ACTION PUBLIQUE ET DEVELOPPEMENT : DONIAMA MOUKOKO SIGNALE L’URGENCE D’UN MBONGUI POUR LA MISE EN ŒUVRE DU NOUVEAU CADRE DE MODERNISATION

Cadre, mais technocrate des finances publiques, l’actuel directeur du suivi de l'exécution du budget de l'État, ne tarit pas de propositions dont la mise en œuvre devrait produire assez d’effet positifs pour le pays. A peine qu’il a présenté son livre, « Les finances publiques : la loi organique relative aux lois des finances en République du Congo » et « souligné l'importance de mener de front la réforme des politiques publiques et celle des finances publiques, Jean D’Arc Doniama Moukoko se fond d’une audacieuse suggestion. « Mbongui pour la mise en agenda du nouveau cadre de modernisation de l'action publique et du développement ». Voici l’intégralité à consommer sans modération.
Le 12 février 2025, j'ai eu l'honneur de présenter mon ouvrage « Les finances publiques : la loi organique relative aux lois des finances (LOLF) en République du Congo ». A cette occasion, j'ai souligné l'importance de mener de front la réforme des politiques publiques et celle des finances publiques. En effet, ces deux réformes sont indissociables : sans une transformation simultanée des politiques publiques, les réformes financières risquent de ne pas produire les résultats escomptés.
Il est essentiel de rappeler que les finances publiques, bien qu'indispensables, ne sont qu'un moyen au service des politiques publiques. Celles-ci désignent l'ensemble des décisions et actions prises par un gouvernement pour résoudre des problèmes sociaux, économiques ou environnementaux. Ces décisions peuvent se traduire par des lois, des régulations ou des programmes spécifiques visant à répondre aux besoins de la société.
Une fois ces politiques définies, elles nécessitent des ressources pour être mises en œuvre, et c'est là que les finances publiques interviennent. Les finances sont donc un outil crucial pour financer les politiques publiques, mais sans une réforme des politiques elles-mêmes, les ressources allouées risquent de ne pas être utilisées de manière optimale. Il est donc impératif de consolider les réformes financières actuelles en les associant à une révision des politiques publiques, afin d'aligner les préoccupations des citoyens avec les priorités budgétaires de l'État.
Mais permettez-moi de pousser un peu plus loin la réflexion. Notre pays, le Congo, a récemment célébré le 67ème anniversaire de la création de la République. Dans quelques mois, plus précisément le 15 août 2025, nous aurons également l'honneur de commémorer le 65 eme anniversaire de notre indépendance. Ces deux événements représentent une occasion unique et symbolique de repenser notre avenir sous un jour nouveau, avec optimisme et ambition, en réformant profondément notre modèle de développement.
LE MBONGUI EN QUESTION
Dans cet esprit, imaginez un instant que les intellectuels, les cadres, les universitaires, les hommes d'églises, les anciens et les jeunes de notre pays se rassemblaient au « Mbongui », cet espace de dialogue traditionnel où les voix convergent et les idées prennent vie. Ensemble, nous pourrions initier une réflexion collective audacieuse, visant à repenser entièrement notre modèle de développement. Un modèle ancré dans nos aspirations les plus profondes : la solidarité intergénérationnelle, l'égalité des chances pour tous, une justice sociale tangible, une paix durable, la protection de l'environnement et un développement économique inclusif, au service de chaque citoyen.
Je suis profondément convaincu qu'une telle initiative, portée par une plateforme de réflexion solide et collaborative, deviendrait une force de proposition inestimable pour notre pays. Ces assises, dédiées à la modernisation de notre société, incarneraient bien plus qu'un simple forum : elles constitueraient un « Mbongui », un point de ralliement pour poser les fondations d'un Congo renouvelé. Un Congo plus juste, plus équilibré, et résolument tourné vers l'avenir.
Pourquoi « Mbongui pour la mise en agenda du nouveau cadre de modernisation de l'action publique et du développement » est-il nécessaire aujourd'hui ?
Les 64 dernières années ont été marquées par des progrès notables, notamment le rétablissement de la paix, une avancée historique qui a permis au pays de sortir d'une période de troubles, ainsi que le développement de grandes infrastructures, telles que la route Brazzaville-Pointe-Noire, un rêve porté par nos anciens et qui est aujourd'hui devenu une réalité, constituant un véritable patrimoine national. Ces réalisations, dont nous devons la reconnaissance à l'engagement personnel de Son Excellence Monsieur le Président de la République ainsi qu'à son esprit de dépassement, ont permis de surmonter de nombreux défis.
Cependant, il est essentiel de souligner que la paix, bien qu'établie, demeure une réalisation fragile. Elle ne peut être considérée comme un acquis définitif, car elle dépend de la consolidation continue des institutions, de la justice sociale et du dialogue entre toutes les composantes de la société. De même, bien que les infrastructures soient impressionnantes, elles nécessitent un entretien constant, permanent et une gestion durable pour continuer à servir les Congolais. Ces progrès ne pourront se pérenniser que s'ils sont soutenus par des réformes profondes visant à moderniser le cadre de l'action publique et à favoriser un développement durable.
DES PARADIGMES D’AVENIR
Ainsi, à l'occasion de notre 65eme anniversaire d'indépendance, il ne s'agit pas simplement de célébrer notre passé, mais de saisir l'opportunité pour repenser en profondeur notre modèle de développement. Le moment est venu de bâtir un avenir à la hauteur des grandes aspirations du peuple congolais : un avenir fondé sur l'unité, la consolidation de la paix, la prospérité partagée et la justice. Un avenir où chaque citoyen, sans exception, pourrait contribuer aux fruits de notre croissance collective et en bénéficier.
Le « Mbongui » représente donc bien plus qu'un simple espace de discussion : il est une nécessité pour notre époque, un catalyseur de transformation et un symbole d'espoir pour les générations futures.
Depuis trop longtemps, nous avons vécu sous un modèle de développement inopérant. Le cadre dans lequel s'exécute l'action publique a montré ses limites, en raison de plusieurs facteurs essentiels .
1. Un héritage colonial dépassé : Si nos institutions et nos politiques publiques sont en partie issues de notre passé colonial, elles n'ont pas fondamentalement évolué pour s'adapter aux réalités et aspirations contemporaines du Congo. Ce cadre est devenu obsolète, rigide, et souvent déconnecté des spécificités sociales, culturelles et économiques de notre pays. Il est devenu impératif que nos Politiques Publiques se reforment pour mieux répondre aux défis d'aujourd'hui et de demain.
2. Un manque de coordination et une approche en silos : La fragmentation institutionnelle n'est pas uniquement une conséquence de notre histoire, mais également le résultat d'une gouvernance qui manque de vision transversale. Les politiques publiques sont élaborées dans des silos ministériels, freinant ainsi la coordination, la transversalité, l'efficacité et l'efficience de l'Action Publique.
3. Des pratiques marquées par l'irresponsabilité et l'immaturité : Au-delà des héritages du passé, ce sont nos propres pratiques qui posent problème. Trop souvent, l'intérêt général est sacrifié sur l'autel des ambitions personnelles. Nous, hauts cadres, cadres et agents de l'État, garants du bon fonctionnement de l'administration de ce beau pays qu'est le Congo, avons manqué à notre devoir de rigueur, de responsabilité et de redevabilité.
L'irresponsabilité et l'immaturité qui imprègnent parfois l'exercice de nos fonctions ne sont pas simplement des manquements à notre devoir, elles portent atteinte à la confiance que les Congolais ont placée en nous. Ces dérives affaiblissent notre nation et compromettent notre avenir commun.
Ces manquements ont conduit à des déséquilibres structurels de l'État : une économie insuffisamment diversifiée, des inégalités croissantes, une exploitation inefficace de nos ressources naturelles, et un affaiblissement du lien de confiance entre l'État et les citoyens.
QU’ATTENDRE DU MBONGUI ?
Dans cette dynamique, la proposition du « Mbongui » se veut un véritable cadre de réflexion et d'action pour l'avenir de notre pays. Il ne s'agira ni d'une conférence nationale bis, ni d'un dialogue politique prévu par l'article 227 de la Constitution, encore moins d'une concertation pour constituer un gouvernement d'union nationale. Le « Mbongui » se présentera plutôt comme une plateforme innovante, réunissant toutes les composantes de la société : la jeunesse, la société civile, les femmes et toutes les forces vives de la nation.
La priorité du « Mbongui » serait de procéder à une révision approfondie du cadre normatif et des politiques publiques, s'étendant de 1956 à nos jours. Cette révision vise à dégager un cadre de modernisation de l'action publique et du développement, en parfaite adéquation avec les défis contemporains et les aspirations légitimes du peuple congolais. Elle permettra non seulement de repenser les politiques passées, mais aussi d'identifier les incohérences et les contradictions au sein du système actuel, tout en éliminant les modèles obsolètes qui ont freiné notre progrès. Ce processus constituerait une base solide pour élaborer une vision nouvelle, cohérente, inclusive et ambitieuse, indispensable à l'établissement d'une gouvernance fondée sur la justice, l'égalité et l'efficacité.
Après cette révision, le cadre de modernisation de l'action publique et du développement devrait se construire autour d'un socle solide de valeurs républicaines qui tirerait son inspiration de la Constitution du 25 octobre 2015 et de nos us et coutumes. Ces principes pourraient inclure:
1. Paix, unité nationale et cohésion sociale : la paix, condition sine qua non pour notre développement, doit être consolidée par une volonté constante d'unité et de fraternité entre tous les Congolais.
2. Autonomie, souveraineté et responsabilité nationale : Il est impératif d'affirmer avec force notre indépendance et de gérer nos ressources avec responsabilité pour garantir notre avenir.
3. Démocratie et gouvernance responsable : la démocratie est une exigence, non un luxe. Elle doit se traduire par une gouvernance transparente et responsable, dédiée à l'intérêt général, et renforcer la participation citoyenne.
4. Droits humains et justice sociale : la justice sociale est un pilier de notre contrat social, garantissant à chaque citoyen l'accès à ses droits fondamentaux. Il est essentiel d'offrir à chacun des opportunités d'une vie digne, en particulier pour les plus vulnérables, et de mettre en place des mécanismes de réduction des inégalités.
5. Fraternité, solidarité et esprit de partage : ces valeurs unissent notre peuple dans sa diversité. Elles doivent se manifester par une volonté d'entraide et de soutien aux plus vulnérables, et se traduire par une redistribution juste des ressources et des opportunités.
6. Éducation, formation et épanouissement personnel : l'éducation est un outil fondamental pour la transformation sociale et économique du pays. Un investissement massif dans l'éducation et la formation est essentiel pour l'avenir des générations futures.
7. Respect de l'environnement et développement durable : la préservation de l'environnement doit être au coeur de notre développement, afin de garantir un avenir durable. Nous devons concilier développement économique et respect de l'environnement, en intégrant des principes écologiques dans chaque décision politique.
8. Développement économique inclusif : l'économie doit être un moteur de croissance durable et de prospérité partagée, bénéficiant à tous les Congolais. La diversification économique et l'investissement dans des secteurs comme l'agriculture durable et les technologies doivent être des priorités pour réduire les inégalités.
9. Justice fiscale : une fiscalité juste et transparente est indispensable pour financer notre avenir commun. Elle doit garantir que chacun contribue équitablement en fonction de ses capacités.
COHESION NATIONALE-GOUVERNANCE INCLUSIVE
Ce socle de valeurs ne devrait pas rester un principe abstrait, mais devenir le cœur battant de notre modèle de développement, unifiant toutes les forces vives de la nation. Il devrait être intégré dans le fondement même de nos politiques publiques, afin qu'il guide chaque action et décision au service de l'intérêt général. Ces valeurs devraient irriguer le quotidien de chaque Congolais et garantir que chacun, quel que soit son statut, trouve sa place dans la construction collective de l'avenir de notre pays. Elles devraient être un impératif dans toutes les politiques publiques, pour assurer une cohésion nationale et une gouvernance inclusive.
Ainsi, le nouveau cadre de modernisation de l'action publique et du développement s'appuierait sur un socle de valeurs républicaines, centré sur un modèle intégré et harmonieux. Ce modèle reposerait sur trois piliers essentiels la solidarité, la protection de l'environnement et le développement économique inclusif. Ensemble, ces trois axes constitueraient les fondations d'un nouveau paradigme de développement, permettant l'élaboration d'une vision stratégique claire et cohérente. Cette vision viserait une croissance équilibrée, équitable et respectueuse des enjeux sociaux, environnementaux et économiques, garantissant ainsi un avenir durable pour tous.
Cette vision stratégique, intitulée « Vision prospective » pour les 20 prochaines années, constituerait le cadre de notre développement à long terme et servirait de fondement à l'élaboration du Programme National de Modernisation du Congo (PNMC), ainsi que la création du Livre Blanc. Ces trois documents seraient les déclinaisons concrètes de notre nouveau paradigme, définissant les priorités, les actions et les réformes nécessaires pour garantir une transformation durable de notre société et de notre économie.
En ce qui concerne l'élaboration d'un nouveau paradigme de développement pour notre pays, celui-ci pourrait s'appuyer sur les éléments suivants :
1) Solidarité : un développement au service de tous
« Les Occidentaux ne connaissent pas notre sociologie profonde, notre société est bâtie sur un substrat important, la solidarité, et cette solidarité fonctionne sur le modèle de la mutualité de la douleur et de la joie. » — Mfumu Fylla Saint d'Eude.
La solidarité est bien plus qu'un simple principe moral : elle devrait être le fondement de la vision du développement pour la République du Congo. Elle incarnerait le moteur de transformation sociale et économique, garantissant à chaque citoyen, quelle que soit son origine, son sexe ou son statut, l'égalité des chances. Ce modèle solidaire trouverait sa concrétisation dans des politiques publiques orientées vers l'inclusion sociale et la réduction des inégalités. Des programmes ciblés pour les jeunes, les femmes et les populations vulnérables devraient être mis en place afin de leur offrir les opportunités nécessaires à leur épanouissement. Cependant, cette solidarité ne se limiterait pas seulement à l'inclusion sociale. Elle devrait permettre également l'ascension sociale, offrant à chacun l'accès à l'éducation, la santé, un emploi décent et un logement digne. Ainsi, la solidarité deviendrait un levier de mobilité sociale, propice au progrès de toute la société.
Au cœur de cette vision se trouve la cohésion sociale, fondée sur le renforcement des liens familiaux. La famille, en tant que cellule fondamentale de la société, devrait être soutenue par des politiques publiques garantissant sa stabilité et son épanouissement. Cela inclut, entre autres, un système de santé robuste pour protéger les enfants, les femmes enceintes, les anciens et les personnes vulnérables, ainsi qu'un soutien dans les domaines importants tels que l'éducation, la santé publique et le logement.
o Adapté nos valeurs culturelles à un modèle de développement durable
Africains et Bantous que nous sommes, il est de notre responsabilité de repenser la manière dont nous pouvons adapter nos valeurs ancestrales à un modèle de développement durable et inclusif. Ce ne sont pas seulement les valeurs à préserver, mais encore faudrait-il les transformer en politiques publiques concrètes, en garantissant leur pérennité tout en répondant aux défis modernes. Pour y parvenir, il est pertinent de s'inspirer de modèles réussis tels que ceux du Japon, de la Chine ou de la Corée du Sud. Ces nations ont su, tout en restant fidèles à leurs racines culturelles et à leur identité profonde, élaborer des politiques publiques innovantes qui ont favorisé leur essor économique et social. Ce qui démontre qu'il est possible de combiner tradition et modernité pour bâtir un futur prospère.
Réinventer notre modèle de développement
Le développement de notre pays ne doit pas être un simple emprunt de modèles étrangers, mais une réinvention fondée sur nos traditions, notre histoire et nos valeurs culturelles. Ce processus passe par l'élaboration de politiques publiques qui, tout en répondant aux exigences contemporaines, préservent et valorisent nos cultures et nos racines. L'objectif est de créer un avenir durable et inclusif où chaque citoyen peut s'épanouir dans un environnement fondé sur la justice sociale, l'équité et la solidarité. Ainsi, nous devrions repenser notre modèle de développement en harmonisant nos valeurs culturelles avec les défis du 21ème siècle. En unissant notre identité profonde aux objectifs de progrès, nous pourrions construire une société qui respecte nos traditions tout en nous projetant vers l'avenir avec ambition et durabilité.
DEVELOPPEMENT RESPONSABLE ET DURABLE AU SERVICE DE L’AVENIR
« La nécessité d'un développement économique pour la satisfaction des besoins de nos populations ne serait inscrite que dans la perspective de la gestion durable de nos ressources, particulièrement des eaux et forêts vu leur rôle d'atténuation des effets liés au changement climatique ». Denis Sassou N'Guesso.
L'environnement est un patrimoine commun essentiel à la construction d'un avenir durable et équitable pour le Congo. Ainsi, le pays s'engagerait à intégrer de manière systématique et transversale les enjeux environnementaux dans toutes ses politiques publiques et stratégies de développement. La gestion responsable de ses ressources naturelles, fondée sur la Loi n 0 33-2023 sur la gestion durable de l'environnement, serait essentielle pour garantir la durabilité des écosystèmes et le bien-être des générations futures. Le respect de l'environnement devrait être inscrit dans toutes les sphères de la société, de la gouvernance à l'agriculture, en passant par l'industrie, les infrastructures et les politiques sociales, afin d'assurer un développement harmonieux et durable.
Le modèle de développement du Congo reposerait sur une gestion durable des ressources naturelles, la transition énergétique et la création d'une économie circulaire. La gestion raisonnée des forêts, des sols et des eaux, l'investissement dans les énergies renouvelables et la promotion du recyclage seraient des priorités clés pour assurer la pérennité des ressources naturelles. En parallèle, des politiques publiques inclusives et écologiques devraient être mises en place pour garantir un environnement sain et accessible à tous, tout en veillant à une justice environnementale qui bénéficierait équitablement à toutes les communautés. Cela inclurait une forte implication des citoyens, des femmes, des jeunes et des populations locales dans la gestion des ressources naturelles, pour garantir un avenir plus vert et plus équitable pour tous.
Développement économique inclusif : croissance partagée pour tous
« Nous avions comme idéal l'indépendance, mais nous n'avions jamais réfléchi, à notre grande honte, sur les voies et moyens de nous développer. » Pascal Lissouba
Le développement économique du Congo devrait se reposer sur un modèle inclusif et durable, visant à garantir une prospérité partagée et équitable pour tous. Ce modèle chercherait à diversifier l'économie et à renforcer l'industrialisation, notamment à travers la transformation locale des ressources naturelles et l'investissement dans des secteurs stratégiques comme l'agriculture durable, les technologies de l'information et de la communication (TIC), l'économie verte, etc.
L'objectif serait de stimuler une croissance économique qui génèrerait les ressources nécessaires au développement durable, tout en s'assurant que ses bénéfices profiteraient équitablement à l'ensemble de la population. Une attention particulière serait portée à la création d'emplois durables et à l'encouragement de l'entrepreneuriat local, avec un focus spécifique sur les jeunes, les femmes et les groupes vulnérables, afin de promouvoir la cohésion sociale et l'égalité des chances.
REPARTITION EQUITABLE DES RICHESSES
Ce processus impliquerait également un renforcement du secteur privé national, la mise en place de politiques d'innovation et des programmes de formation adaptés, dans le but d'accroître la compétitivité nationale. En adoptant des démarches de gouvernance intelligente et inclusive, nous jetterions les bases d'un développement harmonieux, axé sur la croissance économique, l'emploi et une prospérité partagée. Au cœur de ce modèle économique et de développement, la répartition équitable des richesses deviendrait un impératif pour assurer un développement véritablement inclusif. Cela nécessiterait la mise en place d'un système fiscal adapté et transparent. L'État devrait garantir que les fruits de la croissance ne bénéficient pas uniquement à une élite, mais profitent à tous les citoyens, contribuant ainsi à la réduction des inégalités sociales et économiques.
Ce système de redistribution viserait à renforcer la cohésion sociale, tout en luttant contre les fractures sociales existantes. Des investissements soutenus dans l'éducation, la santé et les infrastructures publiques seraient essentiels pour garantir l'accès égalitaire aux services fondamentaux. Pour que ce processus soit véritablement efficace et équitable, un engagement politique fort, la modernisation du système fiscal et une gestion transparente des fonds publics seraient des conditions sine qua non.
En ce qui concerne l'élaboration de la vision prospective pour les 20 prochaines années, celle-ci pourrait reposer sur les éléments suivants :
vision prospective : l'objectif serait de concevoir, au cours du processus du Mbongui, une vision prospective pour les 20 prochaines années, fondée sur un socle solide de valeurs républicaines et en adéquation avec un nouveau paradigme de développement. Cette vision, qui prendrait en compte à la fois les enjeux actuels et les défis futurs, devrait servir de cadre de référence pour l'ensemble de l'action publique. Elle guiderait la planification stratégique, l'élaboration des politiques publiques, la programmation, la budgétisation, ainsi que la gestion transversale des politiques publiques et leur suivi-évaluation. Grâce à ce cadre, toutes les décisions politiques, économiques et budgétaires seraient alignées sur les objectifs à long terme, garantissant ainsi leur cohérence, leur efficacité et leur durabilité.
PLAN NATIONAL DE MODERNISATION ET LIBRE BLANC
Le Mbongui constituerait donc le point de départ de ce processus stratégique. Il serait l'espace où se construirait une vision partagée et ambitieuse pour l'avenir du pays, définissant les grands axes du développement en tenant compte des aspirations profondes des Congolais. Cette vision répondrait aux défis contemporains tout en anticipant les besoins futurs, en veillant à ce que les priorités nationales soient clairement identifiées et soutenues par une large adhésion populaire. Une fois, la vision prospective clairement définie, elle serait déclinée de manière concrète à travers deux documents majeurs : le Plan National de Modernisation du Congo (PNMC) et le Livre Blanc, qui poseraient les bases des réformes structurelles nécessaires pour atteindre les objectifs à long terme.
Plan National de Modernisation du Congo (PNMC), qui constituerait une composante essentielle de la vision à long terme, définirait de manière séquentielle les priorités à mettre en oeuvre sur une période de cinq ans. Ce plan stratégique servirait de guide pour les réformes et actions concrètes nécessaires à la transformation du pays, en alignant les projets à court et moyen terme avec les objectifs globaux de la vision prospective.
o Livre Blanc serait élaboré, non seulement pour établir les grandes réformes structurelles nécessaires, mais aussi pour définir les axes d'un renouveau complet de notre modèle de gouvernance et de développement.
Ce livre blanc porterait sur plusieurs réformes fondamentales, parmi lesquelles :
1. La réforme de la conceptualisation des politiques publiques : cette réforme aspirerait à transformer profondément la manière dont les politiques publiques sont conçues et mises en oeuvre. Elle ambitionnerait d'adopter une approche plus inclusive et participative, qui serait centrée sur les besoins réels de la population, tout en tenant compte des spécificités culturelles et sociales du pays. L'objectif serait de passer d'une gestion sectorielle/ministérielle, souvent déconnectée des réalités locales, à une gestion stratégique, cohérente et alignée avec les priorités nationales.
En favorisant une approche holistique des politiques publiques, cette réforme pourrait permettre une allocation optimale des ressources et une meilleure coordination entre les différents secteurs, garantissant ainsi la synergie des efforts. Il serait également essentiel que ces politiques soient alignées avec les objectifs de développement durable, la cohésion sociale et la réduction des inégalités, afin de garantir un développement équilibré et inclusif.
Dans cette optique, la gestion axée sur les résultats (GAR) pourrait devenir un principe fondamental de cette réforme. Cela permettrait de mettre en place une évaluation continue des performances des politiques publiques, afin d'en garantir l'efficacité et la pertinence. En mesurant les résultats obtenus, il serait possible d'ajuster les actions en temps réel et d'optimiser les ressources investies. Ce cadre de gestion permettrait ainsi de répondre véritablement aux attentes de la population, avec un suivi rigoureux et transparent des résultats.
2. La réforme de la politique sociale : Il s'agirait d'un renouveau profond des politiques sociales, axé sur l'égalité des chances, la protection des populations vulnérables et la solidarité intergénérationnelle. La famille, en tant que cellule fondamentale de soutien et d'épanouissement de chaque citoyen, occuperait une place centrale dans cette réforme. Celle-ci définirait non seulement les principes d'une solidarité nationale renforcée, mais aussi les modalités de financement permettant de garantir son efficacité et sa pérennité.
3. La réforme de la politique fiscale : cette réforme viserait à redéfinir les principes fondamentaux du système fiscal congolais, en mettant l'accent sur quatre axes majeurs : d'abord, la mobilisation des ressources afin d'assurer le financement des dépenses publiques ; ensuite, la redistribution équitable des ressources pour réduire les inégalités socio-économiques à travers l'impôt ; puis, la stimulation de la croissance économique en encourageant l'investissement et la consommation par des mesures incitatives, tout en régulant l'économie pour orienter les comportements des agents économiques, notamment par des taxes écologiques. L'objectif serait de bâtir un système juste, transparent et équitable, où chaque citoyen contribuerait selon ses capacités, tout en assurant une répartition équilibrée des richesses et une réduction significative des inégalités sociales.
Dans cette optique, tous les revenus — qu'ils proviennent du travail ou du capital — devraient être soumis à l'impôt, garantissant ainsi une équité fiscale véritable. La réforme inclurait également un réexamen des niches fiscales pour combattre l'évasion fiscale et les orienter vers des secteurs stratégiques comme l'innovation, l'agriculture durable et les énergies renouvelables.
Par ailleurs, cette réforme chercherait à encourager l'investissement et la création d'entreprises, tout en renforçant la capacité de l'État à financer des projets publics essentiels dans des domaines prioritaires tels que l'éducation, la santé et les infrastructures. En somme, elle ambitionnerait de concilier efficacité économique et justice sociale, en établissant les fondations d'un système fiscal moderne, aligné sur les défis du 21 eme siècle et propice au développement durable du Congo. Ainsi, cette réforme permettrait de transformer la fiscalité en un levier stratégique pour financer les besoins du pays, favoriser la solidarité sociale et soutenir une croissance économique durable et inclusive.
Ainsi, le PNMC et le livre blanc, qui découleraient directement de la vision prospective élaborée au Mbongui, pourraient constituer les fondations stratégiques de l'ensemble de l'action publique pour les années à venir. Ils fourniraient des orientations claires pour la mise en œuvre des politiques publiques et serviraient de boussole pour les projets d'investissement et de développement national.
UN PROCESSUS INCLUSIF ET MOBILISATEUR
Le Mbongui ne devrait donc pas se limiter à un simple moment de réflexion théorique, mais devenir un véritable laboratoire stratégique pour la transformation du pays. Il s'agirait d'élaborer des documents fondateurs qui orienteraient l'avenir du Congo, en garantissant à la fois leur adhésion populaire et leur réalisme opérationnel. Le processus devrait être inclusif, impliquant toutes les parties prenantes intellectuels, cadres, société civile, secteur privé, etc. L'objectif serait de s'assurer que la vision ainsi formulée soit partagée et soutenue par l'ensemble de la nation.
Alignement des politiques publiques au budget de l'État
Le Congo se trouve aujourd'hui à un tournant crucial où la réforme des finances publiques, bien qu'en cours, se fait sans une réforme concomitante des politiques publiques, ce qui crée un désalignement entre les réformes financières et les priorités stratégiques du pays, notamment en matière de gestion budgétaire. Il est donc impératif de profiter de la réforme des politiques publiques pour établir un nouveau cadre de modernisation de l'action publique et de développement qui soit en parfaite adéquation avec les aspirations profondes des Congolais et qui intègre pleinement les réalités culturelles, économiques et sociales du pays.
Ce cadre devrait se reposer sur plusieurs piliers : un socle de valeurs républicaines, un paradigme de développement renouvelé, une vision prospective, un PNMC et un Livre Blanc. L'ensemble de ces éléments constituerait le cadre de référence pour l'élaboration de politiques publiques cohérentes et adaptées aux enjeux identifiés. Ces politiques devraient ensuite être traduites en programmes budgétaires qui permettraient de décliner les grandes orientations stratégiques en actions précises, avec des objectifs mesurables, définis en fonction des priorités d'intérêt général.
Si les pouvoirs publics validaient ce processus de mise en agenda du nouveau cadre de modernisation de l'action publique et de développement, il serait possible d'établir les fondations d'une réforme durable et pérenne. Cela pourrait ouvrir la voie à l'élaboration d'un budget base zéro (BBZ) dès 2028.
Cette approche renforcerait la transparence, l'efficacité et la responsabilisation, tout en veillant à ce que les priorités nationales, y compris celles liées à la culture et au développement durable, soient adéquatement financées et mises en oeuvre. En somme, le succès de ce processus de réforme des politiques publiques et des finances publiques pourrait faire du Congo un modèle de gouvernance efficace et inclusive, capable de relever les défis actuels tout en assurant une gestion optimale des ressources pour un avenir prospère, équitable et respectueux de l'identité congolaise.
COUP DE CŒUR
Je me permets de déterminer cette réflexion avec un coup de cœur. En effet, le Congo se trouve aujourd'hui à un tournant décisif de son histoire, à la croisée des chemins entre un passé douloureux et un avenir porteur d'espoir. Il porte en lui les traces profondes de générations ayant vécu des réalités profondément différentes. D'un côté, il y a ceux que j'appelle les martyrs de la République, nés sous le joug de l'indigénat, victimes d'une époque où l'injustice et la dégradation humaine étaient la norme, où l'humiliation devenait un destin imposé.
De l'autre, il y a ceux nés après l'indépendance, porteurs de l'espoir d'un avenir meilleur. Enfin, il y a la nouvelle génération, celle qui n'a pas connu les horreurs de la guerre civile de 1997, Ces générations, aux parcours et aux souffrances si divers, se croisent aujourd'hui, chacune portant ses rêves, ses cicatrices et ses espoirs pour l'avenir du pays.
Le Congo a aujourd'hui l'opportunité, plus que jamais, de transformer cette réalité en un avenir commun, fondé sur un nouveau modèle de développement, celui de l'équité, de la solidarité et de la responsabilité collective. Ce n'est pas simplement un projet de plus, mais un impératif historique : garantir la dignité de chaque Congolais et faire de notre nation un modèle de développement durable, inclusif et juste pour les générations futures.
Le Mbongui doit donc marquer un tournant décisif dans l'histoire de notre pays, un moment mémorable inscrit dans la mémoire collective, au même titre que d'autres grandes étapes de l'histoire mondiale : le New Deal aux États-Unis en 1933, la création de la Sécurité Sociale en France en 1946, ou encore le Sommet de la Terre à Rio en 1992. Ces moments ont changé le cours de l'histoire, et il en va de même pour nous : le Mbongui doit être le point de départ d'une transformation profonde de notre société, du fonctionnement de l'État et de notre modèle de développement.